Le Conseil de l’ordre des avocats a annoncé, dans une déclaration publiée mercredi, la décision d’observer une « journée de la colère » nationale vendredi 27 septembre, marquée par des actions de protestation avec port de l’uniforme au palais de justice de Tunis et dans tous les tribunaux tunisiens, sous le slogan « Non à l’agression des avocats, le droit à la défense une garantie fondamentale pour l’indépendance du pouvoir judiciaire ».
Le Barreau s’est réuni en urgence mercredi après la décision du procureur général près le Tribunal de première instance de Tunis d’ouvrir une information judiciaire contre un groupe d’avocats du collectif de défense de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi.
A cet égard, l’ordre des avocats a annoncé le boycott du procureur de la République près le Tribunal de première instance et l’a tenu pour responsable de la situation, tout en portant plainte contre lui auprès du Conseil supérieur de la magistrature et du ministère de la justice.
Il a également indiqué qu’il informera les organisations internationales et régionales, le rapporteur spécial des Nations Unies sur l’indépendance du pouvoir judiciaire et des avocats, ainsi que la commission des droits de l’homme des « attaques contre les avocats et des violations des droits de la défense », tout en déclarant « son refus catégorique d’inviter des avocats objet d’une information judiciaire à comparaître, par attachement au principe de l’immunité de l’avocat dans l’exercice de ses fonctions ».
Le barreau a dénoncé « les attaques contre la défense devant le tribunal de première instance de Tunis, à la suite de l’intervention des forces de sécurité sur ordre du procureur général près le tribunal de première instance de Tunis », dénonçant « le ciblage systématique de la profession d’avocat, par le biais d’ouverture « arbitraire d’information judiciaire à l’encontre d’un certain nombre de membres du collectif de défense sous la pression de certaines parties, dans la poursuite d’une gestion irresponsable de cette crise ».
Le Conseil a exprimé sa « solidarité absolue avec la défense des martyrs Belaid et Brahmi », déclarant que « l’atteinte portée à ses membres constitue une atteinte à la profession d’avocat » et annonçant son soutien de « la demande d’accélérer la divulgation de la vérité des assassinats politiques et de l’appareil secret ainsi que le règlement de toutes les plaintes déposées à cette fin ».
Le chef de la branche régionale des avocats tunisiens, Mohamed Hadfi, a déclaré auparavant à l’agence TAP que la branche avait été informée de l’ouverture d’une information judiciaire contre un groupe du collectif de défense des martyrs Belaid et Brahmi.
Le collectif de défense a observé, jeudi dernier, un sit-in dans les locaux du Tribunal de première instance de Tunis. Il demande au ministère public d’examiner l’affaire dite de l’ »appareil secret » ou de la classer et accuse le parquet d’avoir violé le devoir de neutralité dans cette affaire et de mettre en péril le principe d’indépendance de la justice.
Le sit-in a été marqué par des échauffourées suite à l’intervention des forces de sécurité pour évacuer les lieux.
Le collectif a annoncé d’autre part avoir entamé l’ouverture d’une « enquête populaire », après « le refus » du procureur de la république d’ouvrir une enquête sur Mustapha Khader, impliqué selon lui dans l’affaire de l' »appareil secret ».
Le président de l’Association des Magistrats Tunisiens (AMT), Anis Hmaidi, a exhorté pour sa part mercredi le procureur général près la Cour d’appel à poursuivre les investigations concernant les échauffourées survenus jeudi 19 septembre au Tribunal de première instance de Tunis 1.
Il a appelé les structures représentant les avocats à prendre les mesures nécessaires contre certains avocats dont ceux parmi les membres du collectif de défense des martyrs Chokri Belaid et Mohamed Brahmi.
« Les membres du collectif de défense ont occupé littéralement le bureau du procureur de la République jeudi dernier pendant des heures », a fait observer Hmaidi.
De son côté, le comité directeur de l’Association tunisienne des jeunes magistrats (ATJM) avait estimé samedi dans une déclaration que la prise à partie par un groupe d’avocats du procureur de la république près le tribunal de première instance de Tunis en faisant irruption dans son bureau, en y observant un sit-in, en endommageant délibérément son contenu et en agressant le procureur « sont des attaques délibérées qui ne visent pas à révéler la vérité ou à obtenir justice, mais à instrumentaliser l’autorité judiciaire dans le cadre des campagnes électorales de certains avocats politisés ».